Dans une précédente chronique, nous vous parlions de la médiation à destination des professionnels de santé.
Pour rappel, ce sont le décret n°2019-897 du 28 août 2019 instituant un médiateur national et des médiateurs régionaux ou interrégionaux pour les personnels des établissements publics de santé, sociaux et médico-sociaux, et l’arrêté du 30 août 2019 portant approbation de la charte de médiation pour les personnels des établissements publics de santé, sociaux et médico-sociaux, qui ont structuré un dispositif de médiation au sein des hôpitaux, notamment avec l’obligation pour ces derniers de mettre en place en leurs seins des dispositifs de résolution amiable des conflits avant de solliciter l’échelon régional.
Si le dispositif régional s’est réellement structuré en 2020, un médiateur national, qui était à l’époque Edouard Couty, avait commencé ses missions dès 2017.
Un bilan de ces cinq dernières années retrace le parcours réalisé et les axes à développer pour les prochaines années. Entre 2017 et 2021, 415 médiations ont été réalisées au niveau régional et national. 159 saisines ont été enregistrées en 2021.
Répartition par typologie d’établissements : CHU/CHR (38 %), centre hospitalier (37 %) et EHPAD (2 %)
Répartition par mode de saisine : les parties elles-mêmes (61 %), la gouvernance (15 %), les ministères, le centre national de gestion (CNG) ou les agences régionales de santé (7 %)
Répartition par type de profession : personnel médical (59 %), personnel paramédical (20 %) et autre personnel (21 %)
Au-delà du constat, le bilan propose des évolutions réglementaires.
D’abord, il invite à une modification des textes réglementaires pour privilégier la conciliation au niveau local et réserver ainsi la médiation aux médiateurs régionaux et au médiateur national. En pratique, il serait alors plus difficile pour un établissement de santé de créer une cellule de médiation interne. Ceci parait être une aberration quand on sait le taux réussite de la médiation. Se passer de la médiation localement serait passer à côté d’une belle opportunité de régler un conflit en interne. On peut s’interroger sur les motivations de cette proposition qui va à contre-sens de ce que bien d’autres institutions ont mis en place de longue date, comme par exemple la police ou la SNCF.
Le bilan propose aussi d’élargir les publics concernés par la médiation aux étudiants en médecine et paramédicaux. Ca, ce serait une excellente nouvelle !
Enfin, il propose d’élargir la possibilité de recourir au dispositif national de médiation pour des missions de médiation de projet et préventive, ou des missions d’appui, de conseil et d’accompagnement. C’est une bonne idée pour la médiation préventive qui mériterait d’être davantage développée. Il faudrait aussi que les établissements de santé puissent avoir la ressource locale pour la mettre en œuvre sans devoir solliciter l’échelon régional. Présenter des missions de conseil est en revanche maladroit de notre point de vue, pour des médiateurs qui ne doivent en aucun cas avoir des conseils à prodiguer aux médiés. Il y a là un mélange des genres qui peut s’avérer néfaste pour la profession.
A travers ces perspectives parfois hasardeuses, nous constatons tout de même des efforts pour diffuser une culture de la relation plus bienveillante, plus empathique, et développer l’écoute active.
Souhaitons maintenant que les établissements s’emparent du sujet. L’hôpital a du retard dans ce domaine. On aurait trouvé plus pertinent que les médiateurs régionaux soient investis d’une mission d’accompagnement auprès des établissements pour la mise en œuvre d’un dispositif de médiation interne, plutôt que de revendiquer localement la conciliation pour protéger – favoriser ? – les médiateurs régionaux en place. Il n’y a donc plus qu’à croiser les doigts pour que le législateur fasse preuve de bon sens et que le corporatisme ne nuise pas aux initiatives des établissements et à l’intérêt public.
En effet, les enjeux sont bien supérieurs nous semble-t-il. Il s’agit de faire face aux conflits qui gangrènent la vie des hôpitaux, affectent parfois durement les professionnels et, par ricochet, influent regrettablement sur la prise en charge des patients. Essayons de ne pas nous écarter du vrai sujet : celui d’apaiser le climat hospitalier qui en a tant besoin.
Médiation et conciliation, c’est quoi la différence déjà ?
La conciliation consiste en l’intervention d’un tiers, le conciliateur, qui, après avoir écouté les parties et analysé leur point de vue, leur propose une solution pour régler leur différend. Le conciliateur va ainsi les aider par ses conseils ainsi que ses propositions que les parties sont libres d’accepter ou non.
La médiation, elle, est un processus structuré par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends avec l’aide d’un tiers, le médiateur. Ce dernier va accompagner les parties pour qu’elles-mêmes imaginent et trouvent seules une solution à leur différend. Contrairement à la conciliation, la solution viendra des parties et en aucun cas du médiateur. Celui-ci n’a pas à donner son avis. Il a un rôle de facilitateur de communication. Il est, faut-il le rappeler, indépendant, neutre et impartial.
©Hermès Médiation – centre de médiation – Poitiers
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