Le code national de déontologie précise, dans la définition qu’il en donne, que la médiation « … favorise par des entretiens confidentiels, l’établissement et/ou le rétablissement des liens, la prévention, le règlement des conflits ».
« L’établissement et/ou le rétablissement des liens ». Nous y voilà ! Cet acte conditionne l’enjeu de la médiation car la médiation est d’abord un temps de dialogue. Ce lien est le préalable. Sans ce lien, établi ou rétabli, aucun échange n’est possible. La médiation est avant tout un acte de communication. D’ailleurs, toute bonne formation à la médiation consacre un volet aux fondamentaux de la communication.
L’école de Palo Alto l’affirme : « on ne peut pas ne pas communiquer ». Nous avons fouillé nos étagères de livres ainsi que les publications universitaires pour voir ce qui avait été écrit sur le sujet. Et nous avons trouvé de quoi satisfaire notre réflexion, ainsi que matière à susciter votre curiosité, nous l’espérons. Le domaine des sciences de l’information et de la communication recèle d’écrits tout à fait pertinents. C’est cette spécialité-là qui a retenu d’abord notre attention, sous l’angle particulier des médias.
Commençons par Dominique Wolton, directeur de recherche au CNRS en sciences de la communication. Un incontournable. Dans l’un de ses nombreux ouvrages, « Il faut sauver la communication » (Ed. Flammarion, 2005), il affirme ce qui pourrait compléter la devise de l’école de Palo Alto : la victoire de la communication c’est « le passage de la transmission à la médiation ».
Pour Georges Potriquet, journaliste et médiateur, auteur de « La médiation au travail » (Ed. Médias & Médiations, 2020), « la médiation est le propre de l’homme : elle est apparue dès les origines de l’humanité ». Joli clin d’œil à Rabelais soit dit en passant. Et si la médiation est d’abord un acte de communication, alors quelle « fascinante histoire » écrit Jacques Attali dans « Histoires de médias – Des signaux de fumée aux réseaux sociaux » (Ed. Fayard, 2021). Celle-ci « commence avec l’apparition de la parole et du chant, des rumeurs et des signaux de fumée, des battements de tambour et des stèles, des graveurs de pierre et des peintres de cavernes, des griots et des crieurs, des aèdes et des scribes, des colporteurs et des courriers […] l’imprimerie, les journaux, les agences de presse, les magazines, la publicité, la photographie, le téléphone, la radio, le cinéma, la bande dessinée, la télévision, Internet, les réseau sociaux […] ».
Les médias, une pièce de ce grand échiquier de la communication
Depuis un siècle, ils ont fait leur révolution avec l’avancée des nouvelles technologies, l’arrivée de chacune d’entre elles bouleversant l’ordre établi. Quelles places ont-ils pris aujourd’hui ? Quel rôle jouent-ils dans la transmission de l’information mais surtout dans les relations entre les hommes, dans un même espace public et de même culture, entre les peuples au-delà des frontières culturelles ? L’écrit, l’image et le son sont omniprésents dans nos vies et font le tour du monde. « Nous avons, de bonne foi, pensé que ces changements apporteraient un peu plus de paix entre les peuples, mais malheureusement ce n’est pas parce que l’étranger, l’autre, est devenu plus visible que la communication et la compréhension mutuelles en ont été améliorées » constate Dominique Wolton.
La singularité des médias et la complexité des rôles de ces objets culturels « témoignent de l’expérience d’une époque et des médiations à l’œuvre dans la construction du lien communicationnel » commente Amanda Rueda, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Grenoble-Alpes, dans un article intitulé « Des médias aux médiations : quelles médiations, quels objets, quels enjeux ? » (GRESEC, 2010).
Vouloir comprendre le terrain des industries culturelles, c’est appréhender les pratiques de production, de diffusion et de réception des contenus de ce que l’on appelle aussi les médias de masse, par lesquels s’élaborent les processus de représentations et de projection de l’imaginaire. « La culture de masse remplirait jour après jour une fonction de médiation » écrit A. Rueda, qui parle aussi de « la médiation de masse » pour évoquer les rapports entre communication et culture, massif et populaire. Eric Macé, professeur en sociologie à l’Université de Bordeaux, auteur de « Les imaginaires médiatiques » (Ed. Amsterdam, 2006), développe le concept de « médiaculture » en lieu et place de « culture de masse ».
La médiation permet d’appréhender les représentations qu’expriment les acteurs d’une réalité. Paul Béaud, sociologue, aborde cette question de la représentation selon deux axes d’analyse : d’une part, les médias comme moyens d’expression de la représentation que la société se fait d’elle-même et, d’autre part, la présence des phénomènes médiatiques au cœur des rapports de pouvoir. « Tout acte de médiation est avant tout un acte culturel » écrit-il dans « La société de la connivence : média, médiations et classes sociales » (Ed. Aubier, 1984). Les objets culturels portent l’expression d’un discours, de valeurs et de représentations de la société, un acte de médiation qui contribue à créer du lien.
©Hermès Médiation – centre de médiation – Poitiers
La suite, c’est ici : La médiation serait-elle la convergence de la culture et de la communication ? – Acte 2
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