Laurent a 16 ans. Il est atteint d’une pathologie hématologique incurable. Les confrères me sollicitent pour des symptômes difficiles à atténuer. Sa maman, qui accepte mon avis, m’interdit cependant que l’on parle de soins palliatifs à son fils. Je me dirige vers la chambre de Laurent pour faire sa connaissance. Sa maman m’attend. Elle me barre l’entrée de la chambre avec ses premiers mots : « Si vous dites à mon enfant que vous faites du soin palliatif, je vous tue. » Rien, dans son attitude, son regard, sa voix ne laisse présager qu’il s’agit d’une parole anodine. Je rencontre Laurent en me présentant comme médecin de la douleur et des troubles digestifs difficiles.
Quelques mois passent avec un suivi respectueux de la consigne. Laurent a perdu son sourire au fil du temps. Il ne parle que de banalités avec ses proches, ce qui peine sa maman. Elle le questionne, sans succès.
Laurent est très affaibli. Une nouvelle consultation en présence de sa maman est sollicitée. Avec précautions, douceur, sécurité pour lui et sa maman, je questionne Laurent en respectant son rythme. Laurent éclate en sanglots : « Je vais mourir et j’ai peur ». Sa maman est bouleversée : « Mais pourquoi ne m’en parles-tu pas ? ». Un long moment d’émotion, d’amour. Je me tais et repense à l’accueil initial. Cette même mère reviendra me remercier en pleurant dans mes bras pour avoir permis de rétablir les mots, les maux et au-delà, le partage de l’indicible. Sans les brusquer, il fallait juste les accompagner dans leur cheminement.
©Hermès Médiation – centre de médiation – Poitiers
Et pour finir la série « Médiation : chronique d’un médecin », lisez le dernier acte : peut-il y avoir médecine sans médiation ?
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