Les médiateurs de presse sont peu nombreux en France. Leur activité n’a pas connu d’essor depuis les premiers signes il y a trente ans. Et les tendances laissent perplexes sur l’avenir de cette profession particulièrement marginales. Il n’y a donc pas de quoi s’étonner si peu d’écrits ont été publiés sur le sujet, mais ceux qui se sont penchés sur la question ont écrit de quoi surprendre.
C’est le cas de Jacques Noyer, chercheur en sciences de l’information et de la communication à l’Université de Lille, dans « Médiation de l’information télévisée et presse écrite : L’hebdo du médiateur au prisme d’une méta-médiation » (Question de communication, Malades et maladies de l’espace public, OpenEdition Journals, 2007). Selon lui, les objectifs au nom desquels des démarches de médiation sont mises en place, « donner la parole au téléspectateur, exercer un travail d’analyse et de suivi des mécontentements, être l’interface entre le public et les journalistes » sont louables en surface mais peuvent recouvrir de l’entreprise « des intentions stratégiques moins publiquement déclarables ».
La médiation de presse est une activité exposée, minée par la solidarité douteuse du médiateur avec les journalistes et la crise de confiance entre le public et les médias. « Comme si, en somme, écrit Jacques Noyer, la défiance quant à l’information trouverait à se renforcer par le soupçon d’une médiation instrumentalisée au service de la rédaction. Aller à la rencontre du public, c’est avant tout aller à la rencontre des représentations dont il est porteur et rendre possible l’expression de celles-ci ; c’est aussi, en un autre sens, aller à la rencontre des représentations du public que l’on porte, en tant que journaliste, et s’exposer, in situ, à leur remise en cause par la confrontation aux réactions du public ».
Les médiateurs de presse sont toujours des journalistes expérimentés. Ils ont assuré plusieurs fonctions dans l’entreprise et viennent généralement de la haute hiérarchie rédactionnelle. « Ce qui fonde la crédibilité et l’efficacité du poste est sa visibilité pour les lecteurs comme pour la rédaction. La chronique ou l’émission régulière sont capitales. Non seulement cette visibilité rend accessible au public la médiation, mais elle donne aussi au titulaire un vrai statut professionnel dans la rédaction » poursuit Jacques Noyer. « Une charte, ou à tout le moins une définition officielle du rôle du médiateur, ne sont pas toujours adoptées […] Le point le plus important est que l’indépendance du médiateur soit totale ».
On ne peut que souscrire à cette affirmation et au rappel de ce principe. L’indépendance est capitale dans l’exercice de la fonction de médiateur. L’indépendance mais aussi l’impartialité, autre principe élémentaire. Il convient de s’interroger sur ces qualités lorsque le médiateur de presse n’est rien d’autre qu’un journaliste professionnel. Ce prérequis constitue-t-il d’abord un gage aux yeux du public ou, en priorité, un crédit pour les journalistes au nom desquels le médiateur de presse est appelé à s’exprimer ? Les deux, nous l’avons déjà vu dans les interviews de Chantal Pétillat, rédactrice en chef du groupe La Nouvelle République – Centre Presse, et de Jérôme Cathala, médiateur de France Télévisions. C’est probablement ce juste équilibre auquel le médiateur de presse doit parvenir, fragilisant selon les circonstances ces notions d’indépendance et d’impartialité.
©Hermès Médiation – centre de médiation – Poitiers
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