« La vie des entreprises est parfois ponctuée de litiges : un fournisseur défaillant, un client qui tarde trop à payer, un partenaire ou des collaborateurs mécontents […] Dans un monde qui se judiciarise de plus en plus et dans un environnement légal complexe, le coût financier, le temps et l’énergie du dirigeant perdus lors du règlement des différends commerciaux deviennent même, pour certaines entreprises, de véritables menaces pour leur pérennité et leur développement. Face à ces situations, dans l’intérêt de l’entreprise, la médiation est une solution. Encore trop utilisée, elle offre pourtant un grand nombre d’avantages : elle permet de gagner du temps, de limiter les coûts et d’économiser les énergies, en aidant les chefs d’entreprise à trouver eux-mêmes une solution juridiquement acceptable, sans l’intervention des tribunaux ». Voici l’extrait d’une préface signée Geoffroy Roux de Bézieux alors qu’il était encore président du Mouvement des entreprises de France (MEDEF). Paru en 2022, l’ouvrage qu’il préfaçait s’intitule « Médiation commerciale – méthode – stratégies – outils » (Ed. Pearson). Il a été corédigé par trois avocats chevronnés, Catherine Peulvé, Patrick Van Leynseele et Pierre Jung, tous les trois convertis à la médiation.
Dans son avant-propos, Sophie Henry, déléguée générale du Centre de médiation et d’arbitrage de Paris (CMAP), rappelle que la médiation commerciale se développe en France de manière significative depuis vingt ans, ajoutant que « les atouts de la médiation sont désormais reconnus : on pourrait résumer, dit-elle, l’intérêt d’y recourir par l’approche pragmatique de Thierry Breton, qui a affirmé dès 2005, lorsqu’il était ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, que “les entreprises sont là pour gagner des parts de marché, pas des procès”. »
On pourrait discuter de l’affirmation selon laquelle la médiation est désormais reconnue. A Paris et en Ile-de-France certainement, mais dans bien d’autres territoires français, beaucoup reste à faire. Il suffit pour s’en convaincre d’approcher en province les chambres consulaires, les réseaux d’entreprises et les organisations patronales. Derrière le terme de médiation, peu d’acteurs économiques sont en mesure d’y mettre une définition, plus globalement de faire le distinguo entre arbitrage, négociation, conciliation et médiation. Quant à passer à l’acte et à avoir recours à la médiation, force est de constater qu’une énergie importante est encore à investir dans la pédagogie et la dissuasion.
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Dans cette perspective, l’ouvrage « La médiation commerciale » s’avère être un outil remarquable. Il présente l’intérêt de s’adresser autant à des médiateurs qu’à des dirigeants d’entreprise. C’est un guide qui intéressera tout autant des directeurs commerciaux, des directeurs financiers, des juristes, des avocats, des juges. Chacun y trouvera selon ses préoccupations une méthode, un éclairage, des clés, des conseils, des astuces. Les origines et la grande expérience des trois auteurs font la richesse de ce livre, qui met continuellement en parallèle la France et la Belgique sur le plan juridique et des pratiques.
Un chapitre est consacré au conflit dans le monde des affaires, sur la typologie des conflits commerciaux. Un autre, tout aussi complet, s’arrête sur les caractéristiques de la médiation en général et sur les piliers de la médiation commerciale en particulier, rappelant qu’il s’agit là d’un processus volontaire, d’un processus confidentiel, d’un processus efficace avec, au centre de ce processus, un pivot : le médiateur.
Du choix du médiateur à la rédaction de l’accord, tout y passe : la décision d’entrer en médiation, la place de l’avocat dans ce processus, les honoraires, les pouvoirs et la représentation. Une trentaine de fiches-outils viennent compléter cet ouvrage de 500 pages : la communication non verbale, l’utilisation du silence, l’écoute active, la reformulation, le questionnement, la négociation raisonnée, la gestion des situations difficiles, la médiation par visioconférence, la comédiation ou encore la médiation multipartite.
Paul Dhaeyer, président du tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles, de conclure dans sa postface : « la médiation est une opportunité unique pour l’entreprise de reprendre la main sur sa justice en temps réel ».
Créé en 1995 par la Chambre de commerce et d’industrie Paris-Ile-de-France, le Centre de médiation et d’arbitrage de Paris (CMAP) affirme aujourd’hui que deux mois s’écoulent entre l’entrée et la fin de la médiation, et qu’un accord est conclu dans 95 % des situations. Dans « Illusions perdues », Balzac le disait autrement : « un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès ».
©Hermès Médiation – centre de médiation – Poitiers
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